Stefan
Sobkowiak s’est d’abord consacré à la pomiculture biologique, avant de
découvrir la permaculture, une contraction de « culture permanente »,
un concept d’écosystème fonctionnel qui été inventé en 1978 par Bill Mollison,
un écologiste australien.
« En 2007,
nous avons tout arraché et nous avons replanté un mélange d’espèces différentes
d’arbres fruitiers selon un design de permaculture qui est très différent d’un
verger de pommiers bio en monoculture » , a raconté
M. Sobkowiak dans le cadre d’un colloque sur les expériences
agriculturelles qui a eu lieu au congrès de l’Acfas.
En
permaculture, les arbres sont disposés en trios, a expliqué celui qui détient
une maîtrise en architecture du paysage de l’Université de Guelph (Ontario) et
une maîtrise en biologie de la faune de l’Université McGill. Ces trios se
composent d’un pommier, suivi d’une autre espèce d’arbre fruitier, soit un
poirier, un prunier ou un cerisier, par exemple, et finalement d’un fixateur
d’azote, tel un févier d’Amérique ou un robinier. En augmentant la
concentration d’azote dans le sol, les fixateurs d’azote fournissent les
fertilisants nécessaires à la bonne croissance des arbres fruitiers. Selon
cette configuration, les pommiers ne se touchent pas, mais ils se répètent. Si
un insecte ravageur du pommier se pose sur l’un d’entre eux, il devra parcourir
une grande distance avant d’atteindre sa prochaine cible, car le fixateur
d’azote héberge habituellement ses prédateurs et le poirier ne les intéresse
pas.
Dans ce qui est
devenu « le plus grand verger commercial en permaculture de l’Est de
l’Amérique du Nord » , à Cazaville, près d’Huntington,
M. Sobkowiak a également planté, au pied des fixateurs d’azote, des
plantes grimpantes, comme des vignes, des kiwis, des mûriers, des groseilliers,
des cassissiers, des amélanchiers, voire des concombres, des haricots et des
petits pois.
« La
culture biologique permet l’usage de pesticides qui ont été approuvés par la
certification bio. En permaculture, nous utilisons plutôt des pièges pour
capturer et éliminer les deux espèces d’insectes les plus problématiques, soit
le carpocapse des pommes et la mouche de la pomme » , explique-t-il. Pour attirer la mouche de la pomme, il utilise un petit
carré jaune au centre duquel se trouve un point rouge enduit d’une colle dans
laquelle s’englue l’insecte lorsqu’il atterrit sur ce qu’il croit être une
pomme. Par contre, il piège les carpocapses à l’aide de contenants remplis d’un
mélange d’eau et de mélasse.
Dans un verger
en permaculture, on alterne la tonte des allées. « On ne tond pas le
verger en entier à la même date. On tond sur une séquence de six semaines. On
tond d’abord une première demi-allée. La semaine suivante, on tond la moitié de
l’allée voisine, et ainsi de suite. Cette façon de faire permet de toujours
avoir des fleurs dans nos allées, fleurs qui renferment le nectar pour les
pollinisateurs et autres insectes bénéfiques, comme les guêpes, qui mangent les
chenilles à tente et d’autres ravageurs des pommiers » , indique-t-il.
Le spécialiste
de la permaculture a aussi inséré dans l’ensemble de son verger, situé en
bordure d’une forêt, des abris, des dortoirs, des nichoirs et des ruchers
destinés à attirer et à accueillir des oiseaux, des mammifères, y compris des
chauves-souris, et des insectes, dont certains « hiberneront dans ces
structures, ce qui permettra qu’ils soient présents dès l’arrivée du printemps,
afin d’assurer la pollinisation et la prédation d’insectes nuisibles ».
Les diverses
espèces d’arbres fruitiers qui ont été plantées dans une même rangée ont toutes
la même date de cueillette, afin que soit simplifiée la logistique du travail
de récolte, fait remarquer l’agriculteur.
Contrairement
aux vergers traditionnels et même biologiques, le verger en permaculture est « un
écosystème fonctionnel qui épargne à l’agriculteur plusieurs interventions,
tels les arrosages contre les insectes et les maladies. De plus, il accroît la
diversité de production. Si, une année, la production de pommes est moindre
qu’à l’habitude, on peut se rabattre sur les poires, les prunes, les petits
fruits. Cela nous assure une stabilité. Nous ne dépendons pas seulement d’un
fruit, comme dans les monocultures. Le rendement est énorme non seulement en
diversité, mais en saveur. Je n’ai rien à envier aux vergers traditionnels,
qui, en plus, sont des milieux plutôt stériles. Qui plus est, il est beaucoup
plus plaisant de travailler dans ces vergers et de venir y cueillir les fruits,
ce qui n’est pas négligeable » , fait valoir M. Sobkowiak, qui est
couramment invité en France pour enseigner les techniques de permaculture, qui
est là-bas beaucoup plus répandue qu’ici.
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