LE MONDE
| 13.08.2015
Si des chercheurs s’intéressent de près au régime alimentaire de la vache, ce n’est pas pour la faire maigrir, mais pour diminuer sa production de gaz. Le ruminant mange de l’herbe, la digère par fermentation, puis rote et pète pour expulser le méthane formé. Rien de plus naturel, sauf que ce gaz à effet de serre possède un pouvoir de réchauffement 25 fois plus élevé que celui du dioxyde de carbone. Une équipe internationale de scientifiques pourrait avoir la solution : elle vient de tester pendant trois mois une molécule, le 3-nitrooxypropanol (3-NOP), qui inhibe cette synthèse de méthane en agissant sur les bactéries de la panse. Son impact se révèle conséquent : en conditions d’élevage industriel, les 48 vaches laitières qui ont ingéré le complément émettent 30 % de gaz de moins que le groupe témoin.
Cet additif alimentaire contribuera-t-il à la baisse des émissions de gaz à effet de serre ? C’est ce qu’espèrent les auteurs de l’étude, publiée le 30 juillet dans les PNAS (Comptes rendus de l’Académie américaine des sciences) et en partie financée par la société néerlandaise DSM Nutritional Products, qui a développé le 3-NOP. Le méthane issu de la digestion des ruminants est la première source de rejets de l’activité agricole (39 %), d’après l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Et le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) note que l’ensemble du secteur de l’agriculture, de la forêt et de l’utilisation des terres représente 24 % des émissions anthropiques mondiales.
Si des chercheurs s’intéressent de près au régime alimentaire de la vache, ce n’est pas pour la faire maigrir, mais pour diminuer sa production de gaz. Le ruminant mange de l’herbe, la digère par fermentation, puis rote et pète pour expulser le méthane formé. Rien de plus naturel, sauf que ce gaz à effet de serre possède un pouvoir de réchauffement 25 fois plus élevé que celui du dioxyde de carbone. Une équipe internationale de scientifiques pourrait avoir la solution : elle vient de tester pendant trois mois une molécule, le 3-nitrooxypropanol (3-NOP), qui inhibe cette synthèse de méthane en agissant sur les bactéries de la panse. Son impact se révèle conséquent : en conditions d’élevage industriel, les 48 vaches laitières qui ont ingéré le complément émettent 30 % de gaz de moins que le groupe témoin.
Cet additif alimentaire contribuera-t-il à la baisse des émissions de gaz à effet de serre ? C’est ce qu’espèrent les auteurs de l’étude, publiée le 30 juillet dans les PNAS (Comptes rendus de l’Académie américaine des sciences) et en partie financée par la société néerlandaise DSM Nutritional Products, qui a développé le 3-NOP. Le méthane issu de la digestion des ruminants est la première source de rejets de l’activité agricole (39 %), d’après l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Et le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) note que l’ensemble du secteur de l’agriculture, de la forêt et de l’utilisation des terres représente 24 % des émissions anthropiques mondiales.
Inhiber la production de méthane est
donc l’une des pistes étudiées par les chercheurs. Mais les différentes
molécules testées tardent à sortir des stations de recherche. En
cause notamment, des impacts potentiels sur la santé de l’animal.
Avantage non négligeable, le 3-NOP, lui, ne présenterait pas de risque
particulier. « Durant les trois mois d’essai, nous n’avons observé aucun dommage collatéral sur la santé, assure
Alexander N. Hristov, professeur en nutrition animale à l’université de
Pennsylvanie (Etats-Unis) et auteur principal de l’étude. Une
expérimentation sur une période de lactation complète permettrait de
déceler d’éventuels effets à long terme, mais ça me semble peu probable
car la molécule est rapidement métabolisée. »
Mais si les additifs ont du mal à se faire une place sur le terrain, c’est aussi pour des raisons économiques. Depuis une quinzaine d’années, Luc Smessaert, éleveur en Picardie et vice-président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), complète la ration alimentaire de ses 80 vaches laitières avec des graines de lin. « Cela nous permet d’équilibrer l’apport en acides gras, tout en diminuant l’émission de méthane de 20 à 30 %. Mais à 800 euros la tonne, c’est comme si l’on donnait du caviar à notre troupeau ! argue-t-il. Jusqu’à la fin de l’année dernière, notre client achetait le lait à un prix supérieur, ce qui compensait le surcoût. Maintenant nous sommes obligés de réduire les doses. »
Des compléments plus naturels
Pour autant, Jean-Louis Peyraud, chargé de mission auprès de la direction scientifique agriculture de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), s’interroge sur son acceptabilité : « Les Européens voient d’un mauvais œil l’ajout d’additifs chimiques dans l’alimentation des animaux d’élevage. D’autres compléments efficaces pour réduire la production de méthane bénéficient d’une image plus naturelle, comme la graine de lin ou le colza. Plus acceptables, ils ont certainement plus d’avenir dans les exploitations. »Mais si les additifs ont du mal à se faire une place sur le terrain, c’est aussi pour des raisons économiques. Depuis une quinzaine d’années, Luc Smessaert, éleveur en Picardie et vice-président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), complète la ration alimentaire de ses 80 vaches laitières avec des graines de lin. « Cela nous permet d’équilibrer l’apport en acides gras, tout en diminuant l’émission de méthane de 20 à 30 %. Mais à 800 euros la tonne, c’est comme si l’on donnait du caviar à notre troupeau ! argue-t-il. Jusqu’à la fin de l’année dernière, notre client achetait le lait à un prix supérieur, ce qui compensait le surcoût. Maintenant nous sommes obligés de réduire les doses. »
Si le 3-NOP est un jour autorisé à la vente, son prix sera déterminant. « Aujourd’hui,
les éleveurs laitiers sont dans une telle situation qu’ils ne peuvent
pas se payer un inhibiteur de méthane sans le soutien financier des
pouvoirs publics », déclare Michel Doreau, directeur de recherches à
l’INRA. Pour que les éleveurs adhèrent à des pratiques bénéfiques pour
le climat, mieux vaut qu’elles ne grèvent pas leurs finances. « C’est possible car émettre moins de carbone, c’est aussi diminuer les pertes sur l’exploitation »,
affirme quant à lui Thierry Geslain, directeur des affaires
scientifiques et techniques au Centre national interprofessionnel de
l’économie laitière (Cniel).
La filière laitière vient justement de s’engager dans un plan « bas carbone ». Son objectif à l’horizon 2025 : réduire ses émissions de gaz à effet de serre – méthane mais aussi dioxyde de carbone et protoxyde d’azote – de 20 % par litre de lait. Lancé en partenariat avec l’Institut de l’élevage, le plan permettra aux éleveurs de près de 4 000 fermes de bénéficier d’un diagnostic suivi de préconisations. « De nombreuses mesures sont applicables immédiatement : diminuer la consommation d’énergie, cultiver davantage de légumineuses [des plantes connues pour fixer l’azote de l’air], améliorer l’alimentation et la santé du troupeau, énumère Jean-Baptiste Dollé, chef du service environnement à l’Institut de l’élevage. On conseille également aux éleveurs de garder leurs prairies, car elles stockent du carbone. »
Renforcer la place du pâturage, c’est aussi l’idée de Jean-Claude Bévillard, responsable des questions agricoles à France nature environnement : « Le lien au sol permet aux systèmes agricoles d’être plus robustes d’un point de vue économique et environnemental. Plus autonome, l’agriculteur dépend moins de ses fournisseurs extérieurs. » Nourrir son troupeau avec le fourrage produit sur sa ferme et fertiliser ses terres grâce à la matière organique des déjections animales : finalement, rejeter moins de gaz à effet de serre, c’est d’abord faire appel au bon sens paysan.
Source: http://www.lemonde.fr/climat/article/2015/08/13/un-complement-alimentaire-donne-aux-vaches-contre-le-rechauffement-climatique_4723576_1652612.html
La filière laitière vient justement de s’engager dans un plan « bas carbone ». Son objectif à l’horizon 2025 : réduire ses émissions de gaz à effet de serre – méthane mais aussi dioxyde de carbone et protoxyde d’azote – de 20 % par litre de lait. Lancé en partenariat avec l’Institut de l’élevage, le plan permettra aux éleveurs de près de 4 000 fermes de bénéficier d’un diagnostic suivi de préconisations. « De nombreuses mesures sont applicables immédiatement : diminuer la consommation d’énergie, cultiver davantage de légumineuses [des plantes connues pour fixer l’azote de l’air], améliorer l’alimentation et la santé du troupeau, énumère Jean-Baptiste Dollé, chef du service environnement à l’Institut de l’élevage. On conseille également aux éleveurs de garder leurs prairies, car elles stockent du carbone. »
Renforcer la place du pâturage, c’est aussi l’idée de Jean-Claude Bévillard, responsable des questions agricoles à France nature environnement : « Le lien au sol permet aux systèmes agricoles d’être plus robustes d’un point de vue économique et environnemental. Plus autonome, l’agriculteur dépend moins de ses fournisseurs extérieurs. » Nourrir son troupeau avec le fourrage produit sur sa ferme et fertiliser ses terres grâce à la matière organique des déjections animales : finalement, rejeter moins de gaz à effet de serre, c’est d’abord faire appel au bon sens paysan.
Source: http://www.lemonde.fr/climat/article/2015/08/13/un-complement-alimentaire-donne-aux-vaches-contre-le-rechauffement-climatique_4723576_1652612.html