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Au début du printemps de plus en plus de viticulteurs
sèment la confusion (sexuelle) dans leurs vignes: à l'aide de capsules
de phéromones ils leurrent des papillons dévastateurs pour empêcher leur
reproduction. Une alternative aux pesticides qui fait ses preuves.
Jean-Luc Guillon, viticulteur en AOC dans le Cerdon (Ain), un cru du Bugey, a décidé de sauter le pas, à l'instar de nombreux vignerons dans l'Hexagone: "On avait abandonné plus ou moins les insecticides depuis une dizaine d'années, sauf que l'an dernier on a eu d'importantes larves de papillons et malgré nous, on a été obligé de traiter avec un insecticide, ce qui nous a perturbés".
Tous les cinq à six pas dans les rangs, il pose sur le fil de fer guidant les ceps un petit crochet en plastique marron contenant deux capsules.
Elles diffusent dans l'air des phéromones synthétiques pour troubler deux papillons nuisibles, l'Eudémis et le Cochylis, dits "tordeuses de la grappe".
"C'est une méthode de lutte alternative à la lutte insecticide chimique conventionnelle. On place 500 diffuseurs à l'hectare, ils saturent l'atmosphère en phéromones qui sont la copie de celles qu'émettent les femelles pour attirer les mâles", explique Laurent Paupelard, responsable technique chez Soufflet Vigne France, une entreprise de services pour la filière viticole.
Dans ces conditions, le mâle, lorsqu'il cherche à s'accoupler, ne trouve pas la femelle parce que l'hormone sature le milieu. Et sans accouplement, pas de larves: dans le cas contraire, "les vers se nourrissent des boutons floraux, entraînant une deuxième génération de papillons" qui pond sur les raisins, créant une porte d'entrée à la "pourriture grise", source de pertes très importantes, explique M. Paupelard.
Cette méthode, essentiellement commercialisée par BASF (précurseur en la matière) et Terra Fructi, est homologuée depuis 1995 par le ministère de l'Agriculture et autorisée en agriculture biologique.
Fini les pesticides?
La Champagne est la première région viticole de France utilisatrice de cette technique, avec 13.500 hectares sous "confusion sexuelle", soit près de 40% de son vignoble.
En France, selon BASF, 36.000 hectares de vignes sont "confusées" à ce jour. Selon l'Institut national de la recherche agronomique, cela représentait en 2013 seulement 3% du vignoble: un taux bien moindre à ceux de la Suisse et de l'Allemagne, où 43% et 65% des vignobles respectivement bénéficient de cette technique.
La faute aux habitudes et à l'absence de subventions.
Le coût peut en effet être un frein pour certains viticulteurs: les leurres s'achètent deux fois plus cher qu'un traitement classique. Soit environ 150 euros par hectare, contre 70 euros pour un passage insecticide, en comptant tracteur et main d'oeuvre.
Mais lorsqu'il en faut plusieurs par an, ce qui n'est pas rare, la facture s'alourdit. Dans les prestigieuses vignes de Vosne-Romanée (Côte-d'Or), les viticulteurs ont aussi sauté le pas depuis longtemps, avec succès.
"Toute l'appellation", premiers crus et grands crus compris, utilise la confusion sexuelle et "cela fonctionne sans discontinuer depuis 1998", se félicite Michel Gros, président du syndicat viticole du village (130 domaines impliqués).
Autre avantage non négligeable, relève-t-il: "Cette technique a permis de supprimer quasiment la totalité des pesticides", en rétablissant un équilibre entre les insectes parasites et leurs prédateurs naturels.
Selon Denis Longevialle, secrétaire général d'IBMA France, l'association des fabricants de produits de biocontrôle, le marché des alternatives naturelles aux pesticides "est estimé à 100 millions d'euros, soit 5% du marché de la protection des plantes".
Un secteur en plein essor, puisqu'en 2014, indique IBMA, "un produit sur quatre ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché est un produit de biocontrôle".
"Cela illustre une forte innovation: rares sont les entreprises dans ce domaine qui ne s'intéressent pas au biocontrôle", se réjouit M. Longevialle.
Source: http://www.varmatin.com/var/confusion-sexuelle-dans-les-vignes-pour-eviter-les-pesticides.2142060.html
Jean-Luc Guillon, viticulteur en AOC dans le Cerdon (Ain), un cru du Bugey, a décidé de sauter le pas, à l'instar de nombreux vignerons dans l'Hexagone: "On avait abandonné plus ou moins les insecticides depuis une dizaine d'années, sauf que l'an dernier on a eu d'importantes larves de papillons et malgré nous, on a été obligé de traiter avec un insecticide, ce qui nous a perturbés".
Tous les cinq à six pas dans les rangs, il pose sur le fil de fer guidant les ceps un petit crochet en plastique marron contenant deux capsules.
Elles diffusent dans l'air des phéromones synthétiques pour troubler deux papillons nuisibles, l'Eudémis et le Cochylis, dits "tordeuses de la grappe".
"C'est une méthode de lutte alternative à la lutte insecticide chimique conventionnelle. On place 500 diffuseurs à l'hectare, ils saturent l'atmosphère en phéromones qui sont la copie de celles qu'émettent les femelles pour attirer les mâles", explique Laurent Paupelard, responsable technique chez Soufflet Vigne France, une entreprise de services pour la filière viticole.
Dans ces conditions, le mâle, lorsqu'il cherche à s'accoupler, ne trouve pas la femelle parce que l'hormone sature le milieu. Et sans accouplement, pas de larves: dans le cas contraire, "les vers se nourrissent des boutons floraux, entraînant une deuxième génération de papillons" qui pond sur les raisins, créant une porte d'entrée à la "pourriture grise", source de pertes très importantes, explique M. Paupelard.
Cette méthode, essentiellement commercialisée par BASF (précurseur en la matière) et Terra Fructi, est homologuée depuis 1995 par le ministère de l'Agriculture et autorisée en agriculture biologique.
Fini les pesticides?
La Champagne est la première région viticole de France utilisatrice de cette technique, avec 13.500 hectares sous "confusion sexuelle", soit près de 40% de son vignoble.
En France, selon BASF, 36.000 hectares de vignes sont "confusées" à ce jour. Selon l'Institut national de la recherche agronomique, cela représentait en 2013 seulement 3% du vignoble: un taux bien moindre à ceux de la Suisse et de l'Allemagne, où 43% et 65% des vignobles respectivement bénéficient de cette technique.
La faute aux habitudes et à l'absence de subventions.
Le coût peut en effet être un frein pour certains viticulteurs: les leurres s'achètent deux fois plus cher qu'un traitement classique. Soit environ 150 euros par hectare, contre 70 euros pour un passage insecticide, en comptant tracteur et main d'oeuvre.
Mais lorsqu'il en faut plusieurs par an, ce qui n'est pas rare, la facture s'alourdit. Dans les prestigieuses vignes de Vosne-Romanée (Côte-d'Or), les viticulteurs ont aussi sauté le pas depuis longtemps, avec succès.
"Toute l'appellation", premiers crus et grands crus compris, utilise la confusion sexuelle et "cela fonctionne sans discontinuer depuis 1998", se félicite Michel Gros, président du syndicat viticole du village (130 domaines impliqués).
Autre avantage non négligeable, relève-t-il: "Cette technique a permis de supprimer quasiment la totalité des pesticides", en rétablissant un équilibre entre les insectes parasites et leurs prédateurs naturels.
Selon Denis Longevialle, secrétaire général d'IBMA France, l'association des fabricants de produits de biocontrôle, le marché des alternatives naturelles aux pesticides "est estimé à 100 millions d'euros, soit 5% du marché de la protection des plantes".
Un secteur en plein essor, puisqu'en 2014, indique IBMA, "un produit sur quatre ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché est un produit de biocontrôle".
"Cela illustre une forte innovation: rares sont les entreprises dans ce domaine qui ne s'intéressent pas au biocontrôle", se réjouit M. Longevialle.
Source: http://www.varmatin.com/var/confusion-sexuelle-dans-les-vignes-pour-eviter-les-pesticides.2142060.html