Quatre usines de production, cent dix salariés : Lorial, c’est le regroupement des quatre grosses coopératives lorraines et alsacienne. Un outil unique, à la gestion autonome, dédié à l’alimentation du bétail : 190 000 tonnes produites, 250 000 commercialisés pour vaches, volailles et porcs.
Lorial est une coopérative d’autant plus unique que son directeur, Laurent Thiaucourt, vétérinaire de formation, a la recherche dans le sang. Son passage dans une Firm service, lieu de recherche appliquée sur la nutrition animale, n’étant sans doute pas étranger à la mise au point de cet aliment performance.
Les travaux du Pr Rulquin de l’Inra (Institut national de la recherche agronomique) sur la nutrition des vaches laitières avaient déjà retenu l’attention de Laurent Thiaucourt en 1993. « Il a été le premier à déterminer l’acide aminé, la méthionine, permettant aux vaches de produire un lait plus protéiné, en plus grande quantité. »
Mais à l’époque, si les performances de la méthionine, le nouveau Graal des agriculteurs, étaient prouvées, son administration était loin d’être aisée. L’acide aminé n’étant pas granulable. « Les quatre poches de l’estomac des ruminants compliquent les choses. Ce qu’il digère n’est jamais ce qu’il ingère ! »
L’an dernier, Sophie Lemosquet a fait évoluer les travaux du Pr Rulquin. La chercheuse ajoutant un niveau de difficulté en intégrant la problématique du rejet d’azote des ruminants. Car nos vaches ne sont pas vraiment les championnes du rendement. Au mieux, un ratio de 30 % entre ce qu’elles ingèrent et les protéines restituées dans le lait. « 70 % partent en excréments dans la nature. Autant d’azote et donc de pollution. »
Laurent Thiaucourt, armé de son ordinateur, ses connaissances et sa passion, a trouvé l’alchimie d’un tout nouveau dosage avec une méthionine désormais granulable. Donc facile d’utilisation pour les agriculteurs. La force de ce nouvel aliment, dénommé PROTeAM, c’est son dosage en acides animés. « Les ratios ont grimpé de 36 à 42 %. » Sa recette secrète, le Lorial l’a testée sur une vingtaine de fermes volontaires. Au-delà des acides animés, PROTeAM modifie l’apport de soja pour favoriser tournesol et colza, ce qui diminue le coût de façon significative.
Des économies
« D’autres pays comme la Norvège ou les Etats-Unis ont déjà validé ce type de composition, mais en France nous sommes les premiers à le produire. »
Pour autant, les agriculteurs se doivent d’être convaincus. « Nous devions prouver nos performances, les faire valider. » Le Contrôle laitier, aussi scrupuleux qu’indépendant, s’est révélé être l’organisme idéal. Les chiffres ont été rendus publics il y a trois mois. « Avec PROTeAM, le lait est plus riche de 0,28 g en taux protéiné, contient moins d’urée (15 Mgr) et d’azote (-7,7 %). « Ce qui, en valeur scientifique, est énorme. » L’aliment permet d’économiser 1,68 € pour 1 000 kg de lait, « 2 650 € par an pour une exploitation moyenne de 65 vaches ». Filière, environnement et commerce extérieur sont gagnants, estime Laurent Thiaucourt : « Amélioration du taux de protéines, baisse des rejets d’azote et consommation de soja divisée par deux ; aliment que la France importe à 90 % ».
Sur les 120 000 tonnes d’aliments fabriqués pour les ruminants, Lorial en commercialise 50 % dans une gamme en correcteur azoté, dont 40 % de PROTeAM. « Plus de deux cents élevages en Lorraine sont nourris en PROTeAM au quotidien. »