Par Loïc Chauveau Publié le 08-07-2015
A
la Conférence internationale sur le changement climatique à l’Unesco,
les écologues s’inquiètent du devenir de nombreuses animales et
végétales qui auront bien du mal à supporter le réchauffement
climatique.
Un spécimen de papillon empereur. © ARDEA/MARY EVANS/SIPA
Le daté juillet 2015 de Sciences et Avenir (numéro 821, voir
encadré à la fin de cette page) fait sa couverture sur les impacts du
changement climatique en France. Nous y publions plusieurs cartes, dont
celle de la remontée des espèces de poissons, papillons, oiseaux et
chenilles processionnaires. Camille Parmesan
est connue pour être la première écologue à avoir démontré que les
espèces étaient en train de changer d’habitat en réponse au changement
climatique. La chercheuse qui vient de quitter l’université du Texas
pour celle de Plymouth (Angleterre) "
parce qu’en Europe on consacre plus de moyens à la recherche sur le climat", est venu faire la synthèse des plus grandes études menées sur la question dans le monde devant
l’assemblée des scientifiques réunis cette semaine à l’Unesco pour
"Notre avenir commun face au changement climatique". Et les nouvelles de la nature ne sont pas bonnes.
"Sur
4000 espèces étudiées sur terre et dans les océans, la moitié a modifié
son habitat ou son aire de répartition, les 2/3 ont changé de mode de
vie et de 82 à 92% ont montré au moins une réaction cohérente avec une
hausse des températures" a résumé Camille Parmesan. Dans les
océans, les mouvements sont en moyenne de 75 km par décennie, soit plus
rapides que sur terre, car il y est plus facile pour les organismes
vivants de retrouver des eaux plus fraîches. Le phytoplancton détient le
record avec un déplacement vers le nord de 400 kilomètres par décennie.
Un poisson emblématique comme la morue migre de 200 kilomètres dans le
même laps de temps. Conséquence : les effets du réchauffement climatique
seront faibles dans l’Arctique, modéré à nos latitudes tempérées,
fortes dans les tropiques. "
Dans une eau plus chaude et plus acide,
les récifs coralliens auront bien du mal à continuer de fixer le carbone
de l’atmosphère et à servir de nourrisserie pour les poissons
brouteurs, a prévenu
Paul Leadley, chercheur à l’université Paris-Sud.
Il
faut s’attendre à de graves difficultés pour la pêche tropicale qui est
une source essentielle de nourriture pour les pays du sud". Aujourd’hui capteurs nets de carbone atmosphérique, les récifs coralliens pourraient devenir émetteurs dès 2030.
Une adaptation plus difficile sur les continents
Sur
terre, les déplacements sont bien plus lents, et l’adaptation des
espèces est donc bien plus difficile, alors que le réchauffement y est
plus important. Le papillon empereur vient cependant de faire une
colonisation rapide et spectaculaire de tout le sud de la Scandinavie où
il était encore inconnu à la fin du 20e siècle. En revanche, les
espèces vivant sur les reliefs montagneux vont voir leurs aires de
répartition fondre. Ainsi, en France, le papillon Apollon a disparu de
toutes les zones inférieures à 1000 mètres. "
Un autre risque rencontré par les espèces terrestres, c’est de se désynchroniser avec la vie de ses proies et de son habitat" note
également Camille Parmesan. Ainsi, les oiseaux migrateurs calent leurs
départs sur la longueur du jour tandis que les insectes dont ils se
repaissent à leur arrivée dépendent des températures printanières. Comme
celles-ci sont de plus en plus précoces, on constate déjà des
différences de date entre l’éclosion des insectes et l’arrivée des
oiseaux. En général, aucune espèce terrestre ne peut se déplacer plus
vite que la hausse des températures et donc l’anticiper comme arrivent
encore à le faire les animaux marins. Est-ce que le
réchauffement climatique
est cause d’une extinction rapide des espèces ? Ce n’est
vraisemblablement pas la seule cause, estiment les écologues. La
destruction des habitats, l’expansion des espèces invasives, la
dégradation des sols et la pollution de l’eau et de l’air y contribuent
également. A l’
Unesco cette semaine, on ne mettait en tout cas pas en doute
le travail paru dans
Science
en juin 2015 montrant que le taux de disparition des mammifères au
cours du 20e siècle a été 100 fois plus élevé que dans les siècles
précédents.
Source: http://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/20150708.OBS2321/la-course-mortelle-entre-les-especes-et-le-rechauffement-climatique.html