Par :  Sarantis Michalopoulos   |  EurActiv.com   | Traduit par: Manon Flausch
La connexion à Internet est devenue « vitale » pour le travail 
quotidien des agriculteurs, assure Martin Merrild, le président de la 
COPA. Mais ce passage à l’ère numérique ne devrait pas être synonyme de 
plus de complexité de la Politique agricole commune (PAC).
Martin Merrild est le président de la COPA, l’association des 
agriculteurs européens. Il a été interviewé à l’occasion de congrès des 
agriculteurs européens à Athènes.
Comment l’UE peut-elle s’assurer que son initiative pour la 
numérisation de l’agriculture sera abordable pour tous les agriculteurs 
après 2020 ?
La Politique agricole commune (PAC) ne peut garantir qu’une politique
 sera utile et abordable pour tous les agriculteurs dans tous les États 
membres. Cela doit se faire au niveau national, ce que la PAC devrait 
faire, c’est d’assurer qu’il y ait un cadre légal.
Ce cadre légal doit obliger les gouvernements à s’adapter [à 
l’agriculture numérique] et la rendre accessible à tous les types 
d’exploitants.
Il va falloir s’atteler à des défis considérables, comme 
l’infrastructure haut débit et le développement des connaissances 
numériques des agriculteurs.
L’infrastructure haut débit est le point le plus important, tous les 
agriculteurs devraient être connectés à Internet. C’est vraiment vital 
pour le travail quotidien, pour connecter les machines et tous les 
outils technologiques.
En ce qui concerne les connaissances numériques, la prochaine PAC 
devrait mieux encadrer ce sujet que l’actuelle. Les gouvernements 
devraient déjà se pencher là-dessus, lancer des programmes de formation 
des agriculteurs et les aider à investir.
Quelle est votre vision pour la prochaine PAC ?
Comme je l’ai déjà dit, la nouvelle PAC devra bien sûr soutenir les 
revenus des agriculteurs et, surtout, les stabiliser. Je pense qu’il est
 très important qu’elle assure la capacité des exploitants européens 
face à la concurrence au niveau mondial. Il y a un réel besoin de 
discuter de la relation entre d’un côté les ambitions des politiques 
européens qui disent vouloir une PAC libérale et la capacité à 
travailler selon les prix au niveau mondial.
La nouvelle initiative de verdissement et sa bureaucratie constituent
 un système coûteux et compliqué. Nous devons parler de cela. Nous ne 
pouvons pas à la fois être en compétition avec le reste du monde et 
porter un tel fardeau économique et administratif.
La nouvelle PAC doit donc être plus simple.
Il faut simplifier, la PAC devrait être simple. Je discute beaucoup 
avec des agriculteurs, la simplification est leur principal message. Il 
faut que ça soit simple pour qu’ils puissent comprendre, et cesser de 
s’inquiéter.
Le verdissement de la PAC actuelle complique déjà les choses.
 Ne pensez-vous pas que l’introduction d’un angle numérique rendra la 
situation encore plus brumeuse ?
Dans certains cas, les techniques numériques aboutissent en effet à 
davantage de bureaucratie, c’est à éviter. Nous ne devrions pas utiliser
 les technologies numériques pour instaurer de nouveaux programmes de 
contrôles qui compliquent tout. Les outils numériques doivent améliorer 
la productivité des exploitations.
Comment l’agriculture numérique sera-t-elle financée ? 
Certaines parties prenantes estiment qu’il faut utiliser à la fois les 
paiements directs et le pilier du développement rural.
L’agriculture numérique, de précision, doit être soutenue par le 
pilier du développement rural. Selon moi, nous sommes déjà en retard sur
 l’agriculture de précision, en retard sur le soutien aux agriculteurs 
pour entrer dans cette nouvelle ère, parce que nos concurrents 
nord-américains reçoivent un soutien de leurs gouvernements depuis des 
années.
Étant donné la stagnation économique, où va-t-on trouver cet argent ?
Je pense qu’il est important que l’UE trouve de nouvelles sources. 
Ces techniques numériques aideront le secteur agricole, mais aussi toute
 la société européenne à aller de l’avant. Cela ne profitera pas 
seulement aux agriculteurs et aux habitants des zones rurales, mais à 
toute l’UE, puisque la productivité augmentera.
Que pensez-vous des négociations d’accords de libre-échange entre l’UE et des pays tiers ?
Il est très difficile d’expliquer ces négociations en quelques 
lignes. Il s’agit du commerce avec le Canada, le Japon, l’Indonésie, le 
Mexique, le Vietnam et les États-Unis. Il faut souligner que l’UE est un
 exportateur net de produits agricoles. Nous avons besoin d’un accès aux
 marchés dans le monde. Nous soutenons donc la volonté de la Commission 
de trouver de nouveaux marchés.
Cependant, il est  également important de faire remarquer que le 
commerce international doit être juste, non seulement libre, mais aussi 
juste. Nous devons être sur un pied d’égalité. Or, nous savons qu’il y a
 des produits que nous ne pouvons pas concurrencer, il faut donc imposer
 des restrictions sur ces produits-là. C’est le but des négociations : 
comment échanger de manière juste.
Vous dites soutenir la volonté de la Commission d’ouvrir de 
nouveaux marchés, mais à l’heure actuelle un embargo russe a frappé les 
exportations agricoles européennes.
L’embargo russe nous a montré à quel point il est dangereux de 
mélanger commerce et politique pour les agriculteurs. Les personnalités 
politiques ont pris des décisions qui ont forcé la Russie à imposer 
l’embargo. Il s’agissait d’une décision politique, en Europe comme en 
Russie, et le marché russe s’est fermé à nos exportations.
Qui a payé les pots cassés ? Les agriculteurs. Le commerce devrait être séparé de la politique.
 

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