Une étude de l’université du Manitoba se penche sur
la présence d’antibiotiques en provenance de l’alimentation du bétail
que l’on retrouve au final dans des engrais donc dans l’environnement.
Antibiotiques et fumier. Vous ne pensez
probablement pas aux deux en même temps, mais en Amérique du Nord,
fumier et antibiotiques sont souvent liés.
De faibles niveaux d’antibiotiques sont utilisés dans la nourriture
du bétail pour améliorer sa croissance et prévenir des maladies.
Cependant, la plupart de ces antibiotiques finissent dans les déjections
des animaux.
« Très souvent, 90% ou plus des antibiotiques sont excrétés, selon
des études antérieures » explique Francis Zvomuya, chercheur à
l’université du Manitoba à Winnipeg. « Le fumier les contenant est
ensuite utilisé comme engrais pour les cultures agricoles. »
Et ce n’est pas tout. Une fois les engrais répandus dans les champs,
les antibiotiques se retrouvent dans l’environnement naturel se
mélangeant à l’air, au sol, et à l’eau. Ceci peut conduire au
développement de bactéries résistantes aux antibiotiques, problème de
santé publique majeur dans le monde.
Afin de prévenir une telle réaction en chaîne, on doit s’assurer que
les antibiotiques sont détruits avant qu’ils n’atteignent les champs de
culture via le compostage ou le stockage par exemple. La question
étant : « A quelle vitesse ces antibiotiques se décomposent-ils durant
un tel traitement ? » indique le Dr. Zyomuva.
Traditionnellement, les chercheurs ont essayé de répondre à cette
question en ajoutant des antibiotiques à du fumier n’en contenant pas.
Ils ont ensuite utilisé le fumier directement en tant qu’engrais ou
comme compost avant de l’appliquer aux cultures et tester le temps
nécessaire à l’antibiotique pour se dégrader. Le procédé est rentable
et efficace. Cependant, il n’explique pas de manière précise comment les
antibiotiques se retrouvent dans le fumier dans la réalité.
Pour comprendre ce procédé, des chercheurs ont nourri des bœufs avec
des combinaisons différentes d’antibiotiques, puis ont collecté leurs
excréments. Un deuxième groupe de bœufs à été nourri sans antibiotique ;
a été ajoutée ensuite la même combinaison d’antibiotiques à leur
fumier. Les chercheurs ont ensuite étudié dans quel fumier les
antibiotiques se dégradaient le plus rapidement durant la phase de
compostage.
Les résultats sont mixtes. Dans certains cas, les antibiotiques
excrétés se dégradent plus rapidement tandis que pour d’autres, ils se
dégradent plus rapidement lorsqu’ils ont été ajoutés directement au
fumier.
Ces résultats étaient prévisibles, d’après Inoka D.Amarakoon, premier
auteur de l’étude, étudiant en thèse à l’université du Manitoba.
Lorsque les antibiotiques passent à travers le système digestif des
animaux, ils subissent différents changements d’ordre chimique et
biologique ; « ceci peut affecter leur vitesse de dégradation une fois
qu’ils sont excrétés » explique Inoka.
Contrairement aux antibiotiques ajoutés au fumier, ceux excrétés
peuvent s’intégrer différemment au fumier, ce qui peut même changer le
fait qu’ils puissent se dégrader biologiquement ou chimiquement.
Dr. Zvomuya, Inoka et leurs collègues à Agriculture et
Agroalimentaire Canada ont constaté que composter le fumier pendant 30
jours permettait de réduire les concentrations d’antibiotiques d’au
moins 85%. Certains résultats vont même jusqu’à 99%. « Cette étude
montre que composter le fumier avant de l’utiliser comme engrais peut
réduire la diffusion d’antibiotiques dans l’environnement et donc
réduire le risque de développement de bactéries résistantes ».
Le Dr. Zyomuya recommande : « Nous devons faire preuve de prudence en
étudiant les résultats d’études dans lesquelles les antibiotiques sont
ajoutés directement au fumier. »
Pour en savoir plus :
ACSESS - Dissipation of Antimicrobials in Feedlot Manure Compost after Oral Administration versus Fortification after Excretion - doi:10.2134/jeq2015.07.0408
Source :
News University of Manitoba- 15 juin 2016- http://news.umanitoba.ca/rethinking-stink-about-antibiotics-in-manure/
Rédacteur :
Sophie DECAMPS – Chargée de Mission pour la Science et la Technologie à Toronto – sophie.decamps[a]diplomatie.gouv.fr
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