Lors
de la 8ème Conférence sur la biodiversité à Trondheim (Norvège), Emile
Frison présentait le 2 juin, le dernier rapport du Panel international
des experts sur les systèmes alimentaires soutenables. Conclusion :
"Depuis des décennies, l’agriculture industrielle jouit d’un statut
privilégié, mais a été incapable de mettre en place des systèmes
alimentaires durables. Il y a aujourd’hui suffisamment de données
scientifiques pour pouvoir affirmer qu’une transition vers des systèmes
agro-écologiques diversifiés, peut changer de façon spectaculaire cette
situation."
Si nous
voulons protéger la santé humaine et éviter de polluer l’air et l’eau,
d’émettre des gaz à effet de serre et de détruire la biodiversité, il
est nécessaire d’adopter un autre modèle agricole. C’est à cette
conclusion que sont arrivés 20 agronomes et experts renommés, dans le
domaine de l’alimentation et des sciences sociales.
Le rapport publié par le panel des experts des systèmes agricoles
soutenables (IPES-Food) affirme que la solution n’est pas dans ces
immenses parcs d’engraissement pour l’élevage des animaux ou dans ces
monocultures uniformisées qui dominent aujourd’hui le monde agricole,
mais dans la diversification de l’agriculture et sa réorientation vers
des pratiques écologiques.
On peut lire dans ce rapport que les améliorations qu’entrainerait la
transition vers des systèmes agricoles orientés vers l’écologie, se
reflèteraient dans l’amélioration de la santé des humains et des animaux
ainsi que dans l’amélioration de la qualité des sols et de l’eau. Le
nouveau groupe qui est co-présidé par Olivier de Schutter, ancien
rapporteur spécial des Nations Unies sur l’alimentation, comprend des
lauréats du Prix Mondial de l’Alimentation et des responsables de groupe
de recherches dans les biosciences, reconnait que l’agriculture
industrielle fournit de grands volumes de nourriture sur les marchés
mondiaux, mais fait valoir que l’approvisionnement en nourriture ne
serait pas beaucoup touché par une transition vers des systèmes
agricoles diversifiés.
Les membres de ce groupes de travail qui viennent de pays riches et
pauvres et n’ont aucun lien avec l’industrie, affirment que la
dépendance de l’agriculture aux engrais chimiques, aux pesticides et aux
antibiotiques pour gérer l’élevage et les écosystèmes agricoles a
entraîné des crises écologiques, sociales et sanitaires.
Selon le groupe d’experts : "Les systèmes agricoles et
alimentaires actuels entraînent systématiquement des répercussions
négatives et des vulnérabilités. Nombreux sont les problèmes qui peuvent
être spécifiquement rattachés aux parcs d’engraissement industriels et
aux monocultures uniformes qui dominent le paysage agricole et reposent
sur les engrais chimiques et les pesticides comme moyens pour gérer les
écosystèmes agricoles".
En lieu et place de ce système mondial de production intensive de
nourriture, ils proposent de diversifier la production, d’optimiser la
biodiversité afin des construire des écosystèmes agricoles sains et de
garantir des conditions de vie saines.
Selon de Schutter : "Beaucoup de problèmes du système alimentaire
sont spécifiquement liés à l’uniformité qui est au cœur de l’agriculture
industrielle et à sa dépendance aux engrais chimiques et aux
pesticides". Pour lui se contenter de corriger l’agriculture
industrielle n’est pas une solution à long terme. Ce dont nous avons
besoin, c’est d’un changement fondamental.
"Ce qui empêche la progression de l’agro-écologie comme
alternative, ce n’est pas le manque de données scientifiques. C’est le
décalage entre son immense potentiel pour améliorer la situation à
travers le système de production alimentaire et son potentiel bien
moindre de générer des profits pour les firmes de l’agrobusiness."
Toujours selon le rapport : "Il y a de plus en plus de données
scientifiques démontrant que ces systèmes [agro-écologiques] séquestrent
le carbone dans les sols, favorisent la biodiversité, reconstituent la
fertilité des sols et maintiennent les rendements sur la durée. Ils
fournissent ainsi le fondement pour garantir des revenus agricoles."
Des systèmes agro-écologiques diversifiés peuvent aussi favoriser des régimes alimentaires variés et améliorer ainsi la santé.
"Les systèmes de production alimentaire dans lesquels des
matières premières agricoles uniformisées peuvent être produites et
commercialisées à très grande échelle, sont dans l’intérêt des
semenciers, des fabricants de pesticides, des négociants en grains et
des supermarchés."
"Depuis des décennies, l’agriculture industrielle jouit d’un statut
privilégié, mais a été incapable de mettre en place des systèmes
alimentaires durables. Il y a aujourd’hui suffisamment de données
scientifiques pour pouvoir affirmer qu’une transition vers des systèmes
agro-écologiques diversifiés, peut changer de façon spectaculaire cette
situation."
Pour plus d’information : "Messages clés du rapport" en français.
Rapport complet en anglais : "From Uniformity to Diversity : A paradigm shift from industrial agriculture to diversified agroecological systems"
(Cet article reprend en grande partie un article de John Vidal parue dans The Guardian, le 2 juin 2016)
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