dimanche 12 juin 2016

Conférence sur la biodiversité : "Il est urgent de réorienter l’agriculture vers l’agroécologie

Lors de la 8ème Conférence sur la biodiversité à Trondheim (Norvège), Emile Frison présentait le 2 juin, le dernier rapport du Panel international des experts sur les systèmes alimentaires soutenables. Conclusion : "Depuis des décennies, l’agriculture industrielle jouit d’un statut privilégié, mais a été incapable de mettre en place des systèmes alimentaires durables. Il y a aujourd’hui suffisamment de données scientifiques pour pouvoir affirmer qu’une transition vers des systèmes agro-écologiques diversifiés, peut changer de façon spectaculaire cette situation."



Si nous voulons protéger la santé humaine et éviter de polluer l’air et l’eau, d’émettre des gaz à effet de serre et de détruire la biodiversité, il est nécessaire d’adopter un autre modèle agricole. C’est à cette conclusion que sont arrivés 20 agronomes et experts renommés, dans le domaine de l’alimentation et des sciences sociales.

Le rapport publié par le panel des experts des systèmes agricoles soutenables (IPES-Food) affirme que la solution n’est pas dans ces immenses parcs d’engraissement pour l’élevage des animaux ou dans ces monocultures uniformisées qui dominent aujourd’hui le monde agricole, mais dans la diversification de l’agriculture et sa réorientation vers des pratiques écologiques.

On peut lire dans ce rapport que les améliorations qu’entrainerait la transition vers des systèmes agricoles orientés vers l’écologie, se reflèteraient dans l’amélioration de la santé des humains et des animaux ainsi que dans l’amélioration de la qualité des sols et de l’eau. Le nouveau groupe qui est co-présidé par Olivier de Schutter, ancien rapporteur spécial des Nations Unies sur l’alimentation, comprend des lauréats du Prix Mondial de l’Alimentation et des responsables de groupe de recherches dans les biosciences, reconnait que l’agriculture industrielle fournit de grands volumes de nourriture sur les marchés mondiaux, mais fait valoir que l’approvisionnement en nourriture ne serait pas beaucoup touché par une transition vers des systèmes agricoles diversifiés.

Les membres de ce groupes de travail qui viennent de pays riches et pauvres et n’ont aucun lien avec l’industrie, affirment que la dépendance de l’agriculture aux engrais chimiques, aux pesticides et aux antibiotiques pour gérer l’élevage et les écosystèmes agricoles a entraîné des crises écologiques, sociales et sanitaires.

Selon le groupe d’experts : "Les systèmes agricoles et alimentaires actuels entraînent systématiquement des répercussions négatives et des vulnérabilités. Nombreux sont les problèmes qui peuvent être spécifiquement rattachés aux parcs d’engraissement industriels et aux monocultures uniformes qui dominent le paysage agricole et reposent sur les engrais chimiques et les pesticides comme moyens pour gérer les écosystèmes agricoles".
En lieu et place de ce système mondial de production intensive de nourriture, ils proposent de diversifier la production, d’optimiser la biodiversité afin des construire des écosystèmes agricoles sains et de garantir des conditions de vie saines.

Selon de Schutter : "Beaucoup de problèmes du système alimentaire sont spécifiquement liés à l’uniformité qui est au cœur de l’agriculture industrielle et à sa dépendance aux engrais chimiques et aux pesticides". Pour lui se contenter de corriger l’agriculture industrielle n’est pas une solution à long terme. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un changement fondamental.

"Ce qui empêche la progression de l’agro-écologie comme alternative, ce n’est pas le manque de données scientifiques. C’est le décalage entre son immense potentiel pour améliorer la situation à travers le système de production alimentaire et son potentiel bien moindre de générer des profits pour les firmes de l’agrobusiness."
 
Toujours selon le rapport : "Il y a de plus en plus de données scientifiques démontrant que ces systèmes [agro-écologiques] séquestrent le carbone dans les sols, favorisent la biodiversité, reconstituent la fertilité des sols et maintiennent les rendements sur la durée. Ils fournissent ainsi le fondement pour garantir des revenus agricoles."

Des systèmes agro-écologiques diversifiés peuvent aussi favoriser des régimes alimentaires variés et améliorer ainsi la santé.

"Les systèmes de production alimentaire dans lesquels des matières premières agricoles uniformisées peuvent être produites et commercialisées à très grande échelle, sont dans l’intérêt des semenciers, des fabricants de pesticides, des négociants en grains et des supermarchés." 
 
"Depuis des décennies, l’agriculture industrielle jouit d’un statut privilégié, mais a été incapable de mettre en place des systèmes alimentaires durables. Il y a aujourd’hui suffisamment de données scientifiques pour pouvoir affirmer qu’une transition vers des systèmes agro-écologiques diversifiés, peut changer de façon spectaculaire cette situation."

Pour plus d’information : "Messages clés du rapport" en français.
(Cet article reprend en grande partie un article de John Vidal parue dans The Guardian, le 2 juin 2016)


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