L’une des raisons qui expliquent la faible part des légumineuses dans
notre alimentation est le temps nécessaire à leur cuisson. Afin de
profiter des propriétés nutritionnelles de ces graines, des chercheurs
ont développé une gamme de pâtes à base de légumineuses. Ces produits
faciles à utiliser pourraient ouvrir de nouveaux marchés aux protéines
végétales.
Il était un temps, c’était bien avant
l’Internet, où les Français n’hésitaient pas à penser la veille à leur
repas du jour. C’était le temps où l’on faisait tremper ses pois-chiches
ou ses haricots blancs toute une nuit, avant de les faire cuire des
heures durant à feu doux. Aujourd’hui, passer son temps libre à cuisiner
est plutôt rare. Les légumineuses souffrent d’une image de produits
surannés, de cuisine à grand-maman, de plats trop lourds, trop longs à
préparer et qui peuvent provoquer de fâcheuses flatulences. Voilà qui
explique, en partie, le déclin de la consommation de légumineuses : si,
dans les années 1920, les Français en consommaient 7,5 kg par an, en
2016, ils n’en ingèrent qu’un petit kilo et demi.
Et
si l’on pouvait changer cet état de fait ? Et si l’on parvenait à
réconcilier la vie moderne et les légumineuses, dont les propriétés
nutritionnelles sont hors du commun ? C’est à quoi travaillent plusieurs
chercheurs, parmi lesquels Valérie Micard, de l’unité de recherche
Inra-SupAgro Montpellier.
Des spaghettis pas comme les autres
Pour
augmenter la part des protéines végétales dans l’alimentation, l’une
des options est d’intégrer des légumineuses à des produits faciles à
cuisiner, qui se conservent bien et que l’on peut consommer plusieurs
fois par semaine. Des produits qui, en outre, gardent toutes les
qualités nutritionnelles des légumineuses : leur richesse en protéines,
en minéraux, en fibres et en amidon à digestion lente. C’est ainsi
qu’est né le projet Pastaleg. Depuis 10 ans, l’équipe de Valérie Micard
met au point des pâtes alimentaires faites à base de semoule de blé et
de légumineuses. Celles-ci contiennent une teneur élevée en protéines.
De plus, l’association entre une céréale et une légumineuse permet
d’obtenir la plupart des acides aminés indispensables à notre organisme.
Puis, les chercheurs sont allés plus loin et ont réussi à créer des
spaghettis 100 % légumineuse. Deux fois plus riches en protéines que des
spaghettis classiques, ils pourraient trouver, entre autres, un
débouché chez les consommateurs qui fuient le gluten.
Ces
spaghettis constituent une riche palette : lentilles, fève, haricots,
pois-chiches, pois ou pois cassés, chacun peut y trouver son préféré. A
chaque légumineuse, un goût différent, parfois assez éloigné de la
neutralité des pâtes de blé. Les pâtes ont fait l’objet de tests
d’acceptabilité sensorielle en collaboration avec l’Inra de Dijon. « Les
premiers résultats démontrent que ces produits sont bien reçus par les
personnes qui consomment des pâtes complètes », explique Valérie Micard.
La couleur des pâtes varie aussi en fonction de leur matière première :
beiges pour les pâtes à base de fève, bleutées pour celles à base de
lentilles vertes, blanches pour celles à base de haricots. De quoi
attirer l’œil du consommateur vers cette nouvelle gamme de produits !
Reste
à intéresser les entreprises agroalimentaires, et bien sûr, les
consommateurs. Il existe actuellement un effet de mode qui pourrait
permettre à ces produits de trouver leur marché. Les régimes pour
cœliaques (intolérance au gluten) et les produits riches en protéines
destinés aux végétariens ou végétaliens pourraient amorcer la tendance.
Déjà, des industriels s’intéressent au brevet que vient de déposer
l’Inra pour les pâtes 100 % légumineuse. D’autant plus que des
équipements standards peuvent être utilisés pour leur fabrication. Mais
au-delà des pâtes, les légumineuses pourraient aussi entrer dans de
nombreux autres produits : substituts de la viande, pain, yaourts
enrichis en protéines végétales. Ensemble, cet éventail de produits, qui
peu à peu devrait apparaître dans les rayons, pourrait constituer un
débouché à haute valeur ajoutée pour les producteurs de légumineuses. Il
permettrait surtout de rééquilibre la balance en faveur des protéines
végétales, qui, en France ne constituent que 30% des protéines
consommées.
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