Selon une étude de l’Institut national français de la recherche
agronomique, une part importante de la recherche scientifique sur les
organismes génétiquement modifiés serait teintée de conflits d’intérêts
financiers. La firme suisse Syngenta est concernée.
D’après une étude menée
par les chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique
(INRA), 40% des articles scientifiques sur les organismes génétiquement
modifiés (OGM) seraient influencés par les industries de biotechnologie.
Résultat: «Les conclusions ont 49% de chances d’être plus favorables
aux intérêts des industries semencières», rapporte Le Monde.
L’INRA dénonce les liens d’intérêts entre les scientifiques et les
fabricants d’OGM. Deux types de relations sont mis en avant: soit les
auteurs sont des employés d’une industrie, soit l’un des auteurs finance
totalement ou partiellement les travaux. Les entreprises américaines Monsanto, Dow AgroSciences, DuPont Pioneer et la firme suisse Syngenta sont pointées du doigt. Ces multinationales détiennent 60% du marché des semences.
L’efficacité au détriment de la durabilité
Les chercheurs de
l’INRA ont analysé 672 articles publiés entre 1991 et 2015 concernant
l’efficacité et la durabilité de certaines plantes OGM qui produisent
une bactérie nommée Bacillus thuringiensis (Bt). Toxiques contre les
insectes, ces plantes sont utilisées dans les cultures de maïs, de coton
et de soja.
«Les résultats étaient à 104% plus susceptibles d’être favorables
pour les articles consacrés à l’efficacité que pour ceux explorant la
durabilité», explique Thomas Guillemaud, directeur de recherche à
l’institut Sophia Agrobiotech. Cela s’explique par le fait que «les
groupes ont plus intérêt à financer des études qui montrent que leurs
produits tuent effectivement les insectes», alors que les études de
durabilité nécessitent plus de temps et des résultats incertains,
cite Le Monde.
L’INRA est le premier organisme à réellement
s’intéresser aux conflits d’intérêts dans le domaine des OGM. Deux
études s’étaient déjà penchées sur la question, mais l’une d’entre elles
posait également un problème de conflit d’intérêts, précise Denis
Bourguet, ancien membre du Haut conseil des biotechnologies.
Des liens d’intérêts discrets
Bien
que des conflits d’intérêts dans les industries du tabac, de la
pharmacologie et de l’énergie aient déjà été démontrés, l’INRA n’exclut
pas qu’un autre facteur non connu soit la cause à la fois des conflits
d’intérêt et des résultats pro-OGM. Autrement dit, impossible de savoir
si les résultats sont favorables à un groupe industriel parce qu’il a
financé l’étude ou inversement. Pour le découvrir, il faudrait disposer
de trois éléments: «Le projet avant qu’il ne commence, l’étude avant
qu’elle ne soit publiée et l’étude après publication», explique Thomas
Guillemaud.
D’autant que seulement 7% des auteurs d’articles scientifiques ont
déclaré officiellement leur lien d’intérêt avec des industriels. L’INRA
précise que les affiliations plus discrètes tels que les adhésions à des
conseils scientifiques de firmes ou la détention de brevets n’ont pas
pu être pris en compte chez les 1500 chercheurs concernés. Les conflits
d’intérêts non financiers – ou intellectuels – ont également été écartés
de l’étude.
Désireux de maintenir l’impartialité de la science,
l’INRA encourage les revues scientifiques à expliciter les conflits
d’intérêt financiers présents dans les études et à mettre en place un
fonds de recherche qui, tout en étant financé par les industries
concernées, serait indépendant lors du choix des études à financer.
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