mercredi 22 juin 2016

Nouvelles technologies en agriculture Ferme 3.0 : l'agriculture entre dans l'ère du numérique

Mercredi 22 juin 2016  • Terre-net Média 


Dans la Somme, une expérimentation sur l'agriculture à l'ère du numérique est menée en direct depuis un an. Chez Jean-Marie Deleau, les robots binent à la place des humains et les drones survolent les champs pour collecter des données sur l'état des cultures. Objectif : mettre en place l'agriculture de demain, économiquement viable et toujours plus respectueuse de l'environnement.



             Dans la ferme 3.0, les drones permettent de collecter des données sur l'état des cultures. (©Terre-net Média) 
 
La ferme du futur pourrait ressembler à la sienne. A Aizecourt-le-Haut (Somme), l’exploitation de Jean-Marie Deleau a fait son entrée dans l’ère du numérique l'année dernière, lorsqu’il a signé un partenariat avec la Chambre d’agriculture et Agro-transfert Ressources et territoire, la plateforme d’application et de transfert de la recherche agronomique. 85 ans après sa création, la ferme agro-écologique désormais 3.0 de Jean-Marie s’est donc transformée en laboratoire à ciel ouvert. De quoi satisfaire l’agriculteur, qui a toujours souhaité contribuer aux évolutions de son métier, comme son père et son grand-père avant lui.

Depuis un an, 23 essais différents ont été conduits dans les domaines de la robotique , de l’ agriculture de précision et de l’ agriculture connectée . « L’agriculture connaît sa seconde révolution. Après celle de la mécanisation, l’enjeu est maintenant d’appliquer l’informatique à la mécanique », explique Jérôme Cipel, chargé de la numérisation des données à la Chambre d’agriculture de la Somme. Pour y parvenir, les travaux les plus pénibles devront être délégués aux machines. Le temps et l’énergie économisés pourront être réinvestis dans la gestion de l’exploitation et la prise de décisions.

« Notre objectif est de tester toutes les innovations, grandeur nature, avec des expérimentations menées à la fois en micro-parcelles, en bandes et dans des parcelles entières », précise Aurélien Deceuninck, responsable d'équipe productions végétales à la Chambre d'agriculture de la Somme. « Une étape incontournable avant de les diffuser, pour mesurer leur acceptabilité technique, économique et sociale », insiste-t-il. En effet, pas question de revoir à la baisse les objectifs de rentabilité de Jean-Pierre Deleau, ni de toucher à son effectif de salariés. En France, une dizaine d’autres fermes testent déjà le numérique mais l’exploitation de la Somme est la seule à prendre en compte l’aspect économique. Autre avantage, elle est idéalement située : elle regroupe tous les types de sols présents dans la région Hauts-de-France.

Le robot Oz remplace trois personnes

 

Oz bine seul entre les rangées de salades. (©Terre-net Média) 
 
« Nous testons actuellement deux robots », explique le technicien. Le premier, un engin de désherbage, est fourni par Naïo technologies . « Oz se promène seul entre les rangs de la culture et supprime les adventices avec l’outil arrière. À lui seul, il remplace trois personnes. » Le robot est programmable grâce au guidage laser et à une caméra. Il est capable de suivre une personne et apporte ainsi une aide précieuse. Pratique par exemple pour transporter les charges à votre place.

Le second appareil,  conçu par l’ Irstea ,  communique avec un tracteur via un réseau Wi-Fi. Il le suit à la trace et, par l’intermédiaire du GPS, passe exactement au même endroit ou se déporte de quelques mètres. Plusieurs robots peuvent accompagner le tracteur. Objectif ? Limiter le tassement des sols. La largeur de travail augmente tout en réduisant le poids de chaque engin. La répartition s’effectue sur plusieurs matériels, eux-mêmes plus légers car nécessitant moins de puissance.


Le robot de l'Irstea est l'auxiliaire du tracteur grâce à une communication Wi-Fi (©Terre-net Média)

Autres appareils désormais devenus incontournables, les drones sont présents dans les champs pour collecter des données. « Ici, trois dispositifs de type avion cartographient les parcelles et nous informent entre autres sur le stress hydrique , la quantité d’azote à apporter , la présence de maladies  », commente Aurélien Deceuninck. Des drones hélicoptères sont même en mesure de survoler les cultures de plus près. À environ un mètre, ils peuvent fournir des informations sur la flore adventice. Ensuite, un logiciel de reconnaissance faciale, adapté aux besoins agricoles, détecte les mauvaises herbes. Un autre appareil, qui embarque jusqu’à 10 kg de matériel, est capable de pulvériser du désherbant uniquement sur la plante à éliminer.

Face à ces merveilles de technologie, le coût de l’innovation pourrait pourtant en faire hésiter plus d’un. Un drone hélicoptère coûte entre 2 500 et 10 000 € selon le poids qu’il embarque. Le prix d’un drone avion peut monter jusqu’à 25 000 €. Les solutions proposées par les différents acteurs du marché sont loin d’être gratuites mais Jérôme Cipel l’assure : « l’agriculture de précision est toujours rentable ». Il considère même qu’il s’agit d’un cercle vertueux. « Plus les informations sont perfectionnées, plus elles s’affinent », détaille-t-il. « Les coûts seront de toute façon amortis », appuie Daniel Roguet, président de la Chambre d’agriculture.
 

message d'espoir pour l'avenir

 

Toutes les données acquises peuvent être recoupées avec d’autres, provenant de nombreuses sources : météo, satellites, etc. Le logiciel de la Chambre, Mes parcelles , les centralise pour fournir à l’exploitant des préconisations plus fines.  « Le conseil doit être personnalisé, pour identifier les niches d’optimisation, explique Jérôme Cipel. Notre travail porte sur du vivant. Il est imprévisible et évolue sans cesse. C’est pourquoi il est nécessaire de fonctionner au cas par cas. »

Le numérique permettra principalement de limiter le recours aux intrants , donc respecter davantage l’environnement , et de diminuer les coûts de production . Une idée qui va séduire les « ageekculteurs » et permettre de voir venir l’avenir avec un peu plus de sérénité. « C’est un message d’espoir que l’on tente d’envoyer aux jeunes », fait valoir Daniel Roguet.

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