Les systèmes de
connaissance et d'innovation agricoles (AKIS) sont mal adaptés aux défis
du futur. C'est le constat fait par un groupe d'experts européens à
l'issue d'un travail prospectif mandaté par le Comité permanent pour la
recherche agricole (SCAR), et qui a donné lieu au rapport Agriculture knowledge and innovation systems towards the future.
Le SCAR avait déjà posé en 2009 un diagnostic sévère : « le système de connaissances et d’innovations agricoles européen, financé par des fonds publics, semble verrouillé dans d’anciens paradigmes fondés sur des approches linéaires et des présupposés conventionnels ». Dans un rapport de 2012, il incitait à renforcer les partenariats entre la recherche, le transfert et les agriculteurs (voir sur ce sujet une note du CEP). Dans ce troisième rapport (2016), le groupe fait l'état des lieux des connaissances sur les AKIS en Europe, analyse les impacts potentiels de la révolution numérique sur ceux-ci, élabore trois scénarios prospectifs et dresse enfin plusieurs recommandations à destination des pouvoirs publics.
Ces recommandations
portent en particulier sur le conseil aux agriculteurs. Si les
dispositifs institutionnels sont hétérogènes entre pays, une tendance
générale se dégage depuis plusieurs années : la privatisation du
conseil. Ce phénomène a plusieurs conséquences potentielles : un moindre
partage de l'information entre organisations et entre agriculteurs,
l'exclusion de l'accès au conseil pour les producteurs les moins
solvables, le biais commercial dans l'information technique apportée,
etc.
Face à la montée des
acteurs privés du conseil, plusieurs stratégies et rôles des pouvoirs
publics sont possibles : l'appui aux agriculteurs exclus du conseil
privé, la coordination des multiples acteurs du conseil, le rôle
d'arbitre sur l'objectivité de l'information, la garantie de qualité du
service de conseil public comme privé, la régulation du secteur. Le
rapport recommande en particulier de rendre plus transparente la qualité
du conseil, notamment via un système de certification à l'échelle
européenne. D'autres recommandations concernent le ciblage du
financement public du conseil sur les biens publics, les mécanismes
garantissant un flux d'informations et de connaissances entre les divers
acteurs, et le renforcement du suivi et de l'évaluation des systèmes de
conseil.
Alexandre Martin, Centre d’études et de prospective
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