mar. 20 décembre 2016 à 06:01 •
Pascal Cochelin
•
Terre-net Média
L'agriculteur pourra-t-il compter sur les machines dotées d’intelligence artificielle ? (© Montage Freshidea - Fotolia / Terre-net Média)
L'agriculteur pourra-t-il compter sur les machines dotées d’intelligence artificielle ? (© Montage Freshidea - Fotolia / Terre-net Média)
L’agriculture, comme l’industrie et les services, vit la révolution du
numérique. Drones, tracteurs autonomes, caméras, machines de traite
connectées, etc. sont autant de technologies qui optimisent le travail à
la ferme et en plaine. Il ne manque plus à toutes ces machines qu’un
peu d’intelligence pour se voir confier des tâches qui ne sont pas
totalement prévisibles.
Qu’apporte réellement l’intelligence artificielle,
alors que des appareils dotés de simples programmes informatiques
semblent déjà très polyvalents ? C’est la première question que l’on
peut se poser.
La différence tient à un "détail" : l’apprentissage
par la machine. Programmée de manière classique, elle est capable de
traiter des options préétablies. La même machine dotée d’intelligence
artificielle pourra choisir entre ces solutions préétablies et d’autres qu’elle aura "appris" au cours de son "existence".
Le parallèle avec les êtres humains est frappant : le programmeur de la
machine va donner les règles de base (que l’on peut assimiler à
"l’inné" chez l’humain) et la machine va apprendre à faire les meilleurs
choix tout au long de sa vie ("l’acquis" chez l’humain).
Capter plus d’informations qu’un humain
Cette
capacité pose une question cruciale : comment définit-on le "meilleur
choix" ? Exemple concret : une voiture autonome arrive dans une
situation ou l’accident est inévitable. Elle a alors le choix entre se
diriger vers un mur, au risque de blesser gravement ou tuer ses
occupants, ou vers le trottoir, au risque de blesser gravement ou de
tuer les piétons. Comme un programme n’est pas émotif et est capable de
capter beaucoup plus d’informations sur la situation qu’un humain en
pareil cas, nous pouvons attendre que l’option retenue soit meilleure
que celle d’un humain.
Programmer les règles fondamentales pour
permettre ce type de décision est un des enjeux cruciaux auxquels font
face les leaders de l’intelligence artificielle : IBM, Google,
Microsoft, Amazon... Pour ne citer que les plus connus. Ainsi Google
annonce que son programme "Deep Mind", qui fait déjà des miracles, ne donnera tout son potentiel que d’ici une vingtaine d’années.
L’efficience des pratiques culturales
Et en agriculture ? Si l’intelligence artificielle est encore loin de remplacer toute l’expérience humaine, elle va avoir un impact sensible sur l’efficience des pratiques culturales,
c’est-à-dire l’efficacité à la fois technique et économique. Les
recherches se concentrent autour d’une thématique qui met en difficulté
les outils de prévision actuels : les actions demandant une surveillance
quotidienne pour être optimales. La lutte contre les maladies et
parasites ou l’éradication des plantes concurrentes en font partie.
Pour
commencer, le domaine agricole exige des machines aptes à travailler
dans des conditions difficiles (pluie, vent, boue, etc.). Des exemples
comme le NH Drive, développé par le groupe CNH Industrial, ou le
Bonirob, issu de Bosh, montrent que les constructeurs travaillent déjà
sur cet aspect.
De son côté, l’intelligence artificielle nécessite des données à traiter, donc de nombreux capteurs dans les champs, à la ferme et sur les animaux.
Là aussi, les exemples sont légions : sondes permettant d’anticiper la
météo sur des points précis, colliers informant sur le comportement du
bétail, caméras identifiant les maladies sur les plantes... Toutes les
informations importantes pour les agriculteurs sont désormais captables.
Enfin, il faut des logiciels d’intelligence artificielle, à même de traiter les données et de piloter les machines qui appliqueront les décisions. Dans ce domaine, beaucoup de progrès restent à faire. Car si de nombreux logiciels, à l’image de celui de l’UCM (Universidad Complutense of Madrid),
sont déjà capables de "prendre des décisions", il leur manque d’une
part la capacité d’analyser des données en temps réel et d’autre part
l’autonomie dans la mise en œuvre des moyens d’action. Deux points qui
devraient s’estomper dans les années à venir.
Machines, capteurs de données et logiciels
Machines,
capteurs de données et logiciels. En associant ces briques, il est
facile de voir comment l’intelligence artificielle sera utile à
l’agriculture. Pour commencer, les capteurs remontent en temps réel toutes les informations nécessaires sur les cultures et les troupeaux. Ensuite, un logiciel d’intelligence artificielle analyse ces données en continu, en les recoupant avec des informations externes
(coût et disponibilité des intrants, prévisions météo à moyen terme,
statistiques sur les périodes de maladies, etc.) et décide des actions à
mener. Enfin, les machines "missionnées" par le logiciel vont exécuter
les traitements nécessaires, et uniquement ceux qui sont nécessaires.
Au
final, nous sommes encore loin des applications de l’intelligence
artificielle que montrent les films de science-fiction. Mais tous les
éléments dont nous avons besoin sont déjà présents : des machines
autonomes, des capteurs et des logiciels d’analyse et d’interprétation
des données.
Et l’agriculteur dans tout ça ?
Avec les machines dotées d’intelligence artificielle, que devient l’agriculteur ? Il lui reste l’essentiel du travail
: orchestrer et planifier à moyen et long terme, assurer le semis et la
récolte, garantir des conditions d’élevage optimales, etc. Car si
l’intelligence artificielle est surprenante dans ses capacités
d’adaptation et ses perspectives d’amélioration, il lui manque encore un
facteur très humain : le bon sens.
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