Publié le 30/11/2015
L’agriculture écologique
reste la seule option pour nous face au dommages causés par l’ère des
énergies fossiles. L’objectif de baisser les températures de 2 °C d’ici
2020, par la rétention de 10 gigatonnes de carbone atmosphérique,
pourrait être atteint en séquestrant le carbone dans le sol par à
travers l’agriculture biologique qui recoure aux semences résistantes au
climat locales.
Source: http://www.algerie-focus.com/2015/11/131717/
Si la responsabilité de
l’Algérie dans le réchauffement climatique n’est pas engagée, le pays
reçoit de plein fouet ses conséquences. Dans cette contribution, la
sonnette d’alarme est tirée pour interpeller la société civile et les
décideurs politiques sur un problème qui ronge la planète et face auquel
des solutions structurelles au niveau national s’imposent.
Le réchauffement climatique résulte de
l’augmentation de la concentration en CO2 et autres gaz à effet de serre
(GES) dans l’atmosphère provoquée par les activités humaines nuisibles à
l’environnement, telles que la combustion des hydrocarbures, la
déforestation et l’exploitation agricole intensive. Il provoque des
catastrophes naturelles qui ne cessent d’augmenter en fréquence et en
intensité en fonction du temps (sécheresses, inondations et cyclones).
Dernier exemple en date, l’ouragan Patricia est l’ouragan le plus
puissant jamais observé. La communauté scientifique s’accorde sur le
point suivant : si la hausse de la température moyenne mondiale dépasse
les 2°C, il sera impératif de réduire les émissions de GES de 80% d’ici
2020. Autrement, la planète atteindrait un point de non retour
climatique, qui provoquerait notamment la fonte irréversible des
glaciers et par ricochet, la montée des niveaux des océans.
La contribution des facteurs
anthropiques au changement climatique est désormais reconnue et les pays
industrialisés tels que les Etats-Unis et l’Union européenne en sont
les principaux impliqués. Ne représentant que 20% de la population
mondiale, les pays développés produisent plus de 70% des émissions
depuis 1850. Il existe ainsi une injustice climatique, qui met des pays à
très faibles émissions de GES, comme l’Algérie, sur la ligne de front.
Et pour cause, le pays subit l’accélération de la désertification, la
dégradation des sols, la baisse de pluviométrie (moins 30% au cours des
dernières décennies) et de sévères vagues de sécheresse.
Le contexte international n’améliore pas
les choses. Entre 2007 et 2011, des phénomènes climatiques extrêmes ont
chamboulé le marché céréalier mondial. Grande sécheresse en Chine (plus
grand producteur et consommateur de blé dans le monde), précipitations
record au Canada, feux de brousse couplés à la sécheresse en Russie et
tempêtes aux Etats-Unis en sont les causes. Conte-tenu de la dépendance
alimentaire de l’Algérie, toute diminution de l’offre mondiale implique
une forte hausse des prix et un impact économique grave. Pis encore,
selon le dernier rapport de la FAO (Organisation des Nations unies pour
l’alimentation et l’agriculture) sur les perspectives de récolte et la
situation alimentaire dans le monde, même les années ou les récoltes
sont bonnes, l’Algérie reste dépendante. En effet, au cours des 5
dernières années, 68% des besoins céréaliers intérieurs pour fourrage et
alimentation proviennent de l’exportation. Par ailleurs, la spéculation
alimentaire sur les denrées de base exercée par les marchés financiers,
principalement le “Chicago Mercantile Exchange” (CME), empire la situation.
La conférence sur le climat organisée
dans le cadre des Nations unies (COP 21) débutera le Lundi 30 Novembre.
L’Algérie, à travers sa contribution prévue pour cet événement (mais
aussi dans d’autres communications officielles), dit mesurer la gravité
de la situation. Toutefois, les propositions ne sont pas à la hauteur
des enjeux. Le principe très juste de “la responsabilité commune mais différentiée des Etats”
est invoqué, mais des conditions sont posées quant aux mesures
envisagées du côté Algérien (seulement 7% de réduction des GES est
envisagée avec les moyens nationaux). Ce principe se réfère à la notion
de justice climatique, qui consiste en la reconnaissance de l’occident
industrialisé de sa responsabilité historique dans le réchauffement
climatique et d’en assumer les conséquences. Mais qu’attend-on encore
des innombrables conférences des Nations unies sur le changement
climatique, qui à part des discours de façade et des fausses solutions
(basées sur des recettes technologiques toutes prêtes), n’ont jusqu’à
maintenant aboutit sur aucun traité contraignant? Ou encore du texte de
l’accord la COP21 qui occulte complètement la source du mal, à savoir ce
système économique mondial basé sur les énergies fossiles.
En invoquant une conjoncture nationale
difficile due à la baisse des prix des hydrocarbures, l’Algérie est-elle
vraiment en position de marchander quand il s’agit d’un enjeu politique
majeur qui impacte la stabilité du pays? (*)[1]Si
sa responsabilité dans le changement climatique n’est pas engagée, elle
figure néanmoins sur la liste des pays particulièrement vulnérable à
ses effets. Face à la raréfaction des ressources naturelles et aux
conséquences désastreuses sur le climat et l’agriculture, elle est par
conséquent obligée de faire face à cet état de fait. Comment peut-on
encore proposer des solutions basées sur la technologie et conçues dans
le cadre du système capitaliste alors même qu’il est le premier
responsable du dérèglement climatique? Vu la grande dépendance
alimentaire du pays, Il est légitime de se poser des questions quant à
la modestie et à l’insuffisance des mesures touchant le secteur
agricole. Un secteur dans le collimateur puisqu’il représente 1/3 des
émissions mondiales de GES.
Au lieu de s’enfoncer dans cette spirale
infernale, il est temps de repenser la stratégie de lutte et
d’adaptation au dérèglement climatique et cela passe nécessairement par
la souveraineté alimentaire. Le modèle capitaliste agraire actuel est
basé sur l’hégémonie d’une poignée de multinationales sur la
commercialisation des semences et des intrants agricoles ainsi que sur
la spéculation sur les prix des denrées alimentaires. Il prône
l’exploitation agricole intensive qui détruit la terre, le sol, l’eau et
la biodiversité des graines et son maitre-mot est le profit. Une
transition vers un modèle agricole basé sur la souveraineté alimentaire
et le refroidissement de la terre est donc vitale : un modèle de paix et
de non violence qui garantie à la fois justices sociale et climatique
et qui appelle à la réconciliation avec la terre-mère.
En matière de souveraineté alimentaire,
la pionnière Indienne Vandana Shiva a beaucoup à dire. Docteur en
physique, elle a fondé en 1991 Nevdanya, un mouvement national qui œuvre
pour la protection de la diversité et de l’intégrité des ressources
vivantes (des graines indigènes en particulier) et qui encourage
l’agriculture biologique et le commerce équitable. Ce mouvement a réussi
à conserver plus de 3000 variétés de riz en provenance de toute l’Inde,
et 60 banques de semences ont été mises en place dans 16 États à
travers le pays. Contactée par e-mail, Vandana Shiva met en
garde l’Algérie contre l’industrie agro-alimentaire, ces ennemies du
climat qui se servent de la crise pour assurer la continuité de leur
modèle agricole. Elle nous donne également quelques conseils pour sortir
surpasser dépendance alimentaire: “En Inde, on dit que la
révolution verte avait augmenté la production de blé, ce qui est un
raisonnement fallacieux. Les monocultures de blé, adaptées à
l’agriculture basée sur l’industrie pétrochimique, avaient augmenté la
surface des terres cultivées. Cela a augmenté la quantité de blé cultivé
au détriment des autres cultures comme les légumineuses et les
oléagineux. A présent, les légumineuses et les oléagineux se vendent à
des prix astronomiques à cause de la destruction de la biodiversité de
l’Inde, faisant de ce pays un importateur de légumes secs et d’huiles
comestibles. Désormais, les Indiens consomment de l’huile de soja
génétiquement modifiée importée de manière illégale.
[…]Les fausses solutions
promues par l’industrie agro-alimentaire, telle que «l’agriculture
climato-intelligente”, sont simplement une extension du système
alimentaire basé sur les énergies fossiles. Continuer dans ce système ne
fera qu’aggraver la crise climatique.
La propriété
intellectuelle sur les semences constitue la pierre angulaire pour
l’avenir de ce système obsolète. Sans semences brevetées, la viabilité
de ce modèle de production destructeur est compromise. C’est pour cette
raison que l’industrie biotechnologique (qui est aussi l’industrie
chimique, et qui fut l’industrie des armes pendant les guerres
mondiales) s’efforce à rendre illégale la conservation des semences afin
de s’assurer le monopole sur le marché des semences brevetées de
l’occident.
Source: http://www.algerie-focus.com/2015/11/131717/
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