Publié le 14/07/2015
La production mondiale de blé dur ne couvre plus le
niveau de consommation depuis plusieurs années et tout porte à croire
que la situation ne se redressera pas dans les prochains mois. Si le
rapport de prix de cette céréale par rapport aux autres cultures est
favorable, la filière est confrontée à des problèmes structurels.
« La montée des prix est un signal pour les producteurs français.
Le marché mondial a besoin d'un accroissement de la production de blé dur,
c'est une opportunité, en particulier pour les pays comme la France, où
les rendements connaissent des variations interannuelles de faible
ampleur ».
C'est en ces termes que FranceAgriMer conclut sa note de conjoncture
publiée le 9 juillet dernier à l'issue du dernier conseil spécialisé
Céréales. Le déclin de la production mondiale de blé dur est une réalité
observée depuis des années alors que la demande existe. Elle est même
peu sensible aux variations de prix des marchés.
Tous les pays producteurs de blé dur sont touchés par une baisse de leur production,
qu'ils soient exportateurs (Canada, Etats-Unis) ou importateurs
(Tunisie, Maroc Algérie). « Le recul de la production au Moyen-Orient
est dû à l'importante diminution des surfaces récoltées et à la forte
sécheresse qui a sévi dans le sud-est de la Turquie et en Syrie,
exportatrice nette avant la guerre », souligne par exemple
FranceAgriMer.
Il semble que les conditions ne soient pas réunies pour envisager,
dans les prochaines années, un redressement de la production de blé dur
suffisant pour couvrir la demande mondiale.
Pas de redressement en vue
En France, on constate certes une hausse de la
récolte de 15 % en 2015 mais la production de 1,7 million de tonnes (Mt)
resterait inférieure à la moyenne quinquennale (- 16 %). En Europe, la
production de blé dur devrait connaitre aussi un rebond, selon
FranceAgriMer car les surfaces cultivées en Espagne et en Italie se sont
accrues comme en France.
Mais
au niveau mondial, la situation demeure incertaine.
FranceAgriMer table sur une production de 34,8 Mt contre 32,8 Mt en
2014, soit une progression de 2 Mt. Toutefois, cette production ne sera
pas encore suffisante pour couvrir la demande. « Il devrait donc en
résulter un nouvel affaiblissement des stocks alors qu'ils étaient déjà à
des niveaux remarquablement bas », déplore l'organisme public.
Pourtant, les superficies dédiées au blé dur au Canada et aux
Etats-Unis sont en forte progression. Les conditions de semis ont été
bonnes. Mais si ce premier pays s'attend à une récolte record de 6,7 Mt
(contre 4,7 Mt en 2014), il se peut que la sécheresse dans le Dakota
conduise les Etats-Unis à revoir ses prévisions à la baisse. Et au
Mexique, nous savons déjà que les rendements ne seront que de 5 t par
hectare contre 6,5 t/ha l'an passé en raison des températures élevées du printemps.
Des problèmes structurels et conjoncturels
Par ailleurs, la production mondiale déficitaire de blé dur attendue
pour 2015 fait suite à la grave crise de l'an passé. Avec une surface en
recul de 13 % par rapport à son niveau de 2003, la récolte avait non
seulement chuté de 12 % mais les grains engrangés étaient en plus de
piètre qualité. Pour couvrir les besoins des pays importateurs, « le
commerce mondial a dépassé les 9 Mt et les stocks ont atteint le niveau
de 4,6 Mt contre 7,4 Mt un an plus tôt, soit une chute de plus de 38 %
», déplore FranceAgriMer.
Des raisons à la fois structurelles et conjoncturelles expliquent le
déficit de production du blé dur observé depuis des années, et par
conséquent le niveau élevé des prix.
La rentabilité de cette culture n'est pas toujours assurée. Celle-ci
exige un niveau de technicité que ne requiert pas le blé tendre.
La plante est aussi sensible au moindre aléa climatique.
Au Canada,
« la météo contrariante n'a pas eu de conséquences majeures sur les
volumes récoltés en 2014. Mais elle a en revanche contribué à fortement
dégrader la qualité des grains ». Selon le Canadian Wheat board, elle
était la pire jamais enregistrée ces dernières années.
Par ailleurs, les rapports de prix entre du blé dur de qualité d'une
part et, les maïs et les sojas d'autre part, n'ont pas toujours été
favorables lorsque les marchés céréaliers étaient tendus en 2010/2011
par exemple. Aussi, les agriculteurs n'ont pas hésité à s'en détourner
pour profiter pleinement de la conjoncture.
Un marché mal organisé
Et ces deux dernières années, il semble que le retour à des prix faibles du blé, du maïs et du soja
n'a pas été suffisamment déterminant pour que les céréaliers reviennent sur leur choix.
Le blé dur souffre aussi d'un marché mal organisé et difficilement
appréhendable, faute de transparence. Il n'existe aucun mécanisme de
couverture (marché à terme). Quelques milliers de tonnes suffisent à
faire flancher les cours et il n'existe pas de marché à terme pour en
atténuer la volatilité.
Au Canada, les
défaillances de l'organisme statistique Statcan en 2013 ont
conduit, faute d'informations publiées fiables, à amplifier la chute
des cours et à désorganiser la commercialisation des grains en créant
des problèmes logistiques et d'acheminement démesurés.
C'est aussi la faiblesse des stocks mondiaux de blé dur, à ce jour au
plus bas, qui renforce les difficultés de régulation des marchés.
Les stocks cumulés des trois premiers pays exportateurs à la fin de
la campagne 2014/15 seront, en valeur absolue, les plus bas jamais
enregistrés depuis 1963. Soit depuis plus de 50 ans, souligne
FranceAgriMer.
Source: http://www.agrisalon.com/actualites/2015/07/14/la-planete-manque-de-ble-dur