En 2016, une équipe internationale impliquant l’Inra révèle qu’en
augmentant le nombre et la diversité des insectes pollinisateurs, on
accroît aujourd’hui le rendement de ces cultures de plus de 20 % en
moyenne à l’échelle mondiale. Fruit d’une vaste étude menée dans 12 pays
pendant 5 ans, ces résultats sont publiés dans Science le 22 janvier
2016.
Les cultures pollinisées par les insectes assurent plus du tiers de
notre alimentation à l’échelle mondiale. Beaucoup de travaux récents
portent sur le déclin des insectes pollinisateurs, au premier rang
desquels figurent les abeilles sauvages et l’abeille mellifère, tant en
abondance qu’en diversité. Mais rares sont les études qui examinent les
conséquences du déficit potentiel de pollinisation qu’il engendre en
termes d’impacts sur les productions agricoles et donc sur la sécurité
alimentaire. Mis à part la modélisation, quelques études empiriques se
sont intéressées ces dernières années à l’effet du niveau de
pollinisation sur les cultures, mais la plupart étudient des fleurs
individuelles, des rameaux ou des plantes isolées en pot, de sorte qu’il
est très difficile d’extrapoler ces résultats en termes de rendement
pour l’agriculteur.
Quantifier l'impact des pollinisateurs sur le rendement agricole : une étude menée dans douze pays
Une équipe internationale impliquant l’Inra et constituée de 35 chercheurs, a appliqué le même protocole de terrain1
sur 344 parcelles représentant 33 types de cultures dans 12 pays à
travers le monde (principalement Afrique, Asie et Amérique du sud) sur 5
ans. Elle a ainsi réussi à quantifier, à une échelle globale, les
relations entre rendements agricoles d’une part (en kilos par hectare)
et abondance et diversité de la faune pollinisatrice d’autre part. Les
chercheurs ont largement pris en compte les petites exploitations
agricoles dans les pays en développement, celles-là mêmes qui ont été
ignorées dans la plupart des études antérieures alors qu’elles jouent un
rôle clé dans la sécurité alimentaire de la population mondiale.
Pollinisateurs plus nombreux et plus divers : accroissement de 20 % des rendements agricoles dans le monde
Les
scientifiques ont montré que les déficits d’insectes pollinisateurs
sont aujourd’hui responsables d’une proportion importante du déficit de
rendement dans ces cultures et ce, même après avoir pris en compte les
principales autres variables environnementales et agronomiques (comme le
niveau d’intensification et le niveau de dépendance de la culture à la
pollinisation par les insectes). Ainsi, l’abondance des insectes
pollinisateurs contribue à elle seule à expliquer 31 % en moyenne du
déficit de rendement dans les parcelles de moins de 2 hectares. Dans les
parcelles plus grandes où la diversité de la faune pollinisatrice est
souvent plus faible avec une large prédominance de l’abeille mellifère,
les chercheurs ont trouvé un gain de productivité similaire (moyenne
30%) lorsque la faune pollinisatrice est diversifiée. Mais lorsque cette
diversité est faible, le gain de productivité est nul de sorte que
globalement, lorsque l’on augmente le nombre mais également la diversité
des insectes pollinisateurs, on accroît le rendement des cultures de
plus de 20 % en moyenne à l’échelle mondiale. Ces résultats mettent donc
en évidence l’impact du déficit des populations d’insectes
pollinisateurs à une échelle mondiale.
L'intensification écologique : une bonne voie
L’humanité
doit aujourd’hui relever un double défi : d’abord, produire des denrées
alimentaires pour satisfaire la demande croissante d’une population qui
augmente ; mais également produire cette nourriture de façon acceptable
sur le plan environnemental et social. L’intensification écologique,
c’est-à-dire l’amélioration du rendement des cultures en s’appuyant sur
la biodiversité, a été proposée comme une voie durable pour répondre à
ces défis. Dans ce contexte, les résultats obtenus dans cette étude
montrent que cette intensification écologique (qui permet d’améliorer
l’abondance et la richesse de la faune pollinisatrice) crée des
situations mutuellement bénéfiques pour la biodiversité et pour le
rendement des cultures. Ce mode de production contribue ainsi au
développement de systèmes agricoles durables, y compris dans les petites
exploitations des pays en voie de développement.
1. Vaissière BE, Freitas BM, Gemmill-Herren B. 2011. Protocol to detect and assess pollination deficits in crops : a handbook for its use. FAO, United Nations, Rome, 81 p.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire